07/03/2022

Raconte-moi ton parcours de métreur…

Nadia, métreur de profession, responsable des études dans l’entreprise “Bonnet Maurice carrelage” à Vertou et membre du groupe “femmes” à la Fédération française du bâtiment, répond avec enthousiasme et conviction à nos questions sur les métiers du bâtiment au féminin. Elle évoque son parcours, les obstacles mais aussi les perspectives d’embauche.

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Pouvez-vous nous raconter votre parcours scolaire et professionnel ?

Depuis le collège, je dessinais des plans de maison. C’est donc assez tôt et tout naturellement que j’ai eu envie d’intégrer une école de dessin ou d’architecture. 

J’ai rejoint le lycée Livet à Nantes en section Génie civil parce qu’il proposait cette formation de dessin orientée sur le bâtiment. Tout au long de ces trois années, j’ai pu découvrir les possibilités de débouchés dans le secteur du bâtiment allant du métier de géomètre à laborantin en passant par celui de conducteur de travaux…

Après avoir obtenu mon Baccalauréat technologique, j’ai poursuivi un cursus en BTS par alternance. 

Par méconnaissance de la formation, j’ignorais les obstacles à franchir et ce n’est pas sans mal après bien des recherches que j’ai enfin trouvé une entreprise désireuse de recruter une salariée à mi-temps, en aide conducteur de travaux. 

En me faisant confiance, la société Baron m’a mis le pied à l’étrier pour commencer ma carrière professionnelle. Avant même l’obtention de mon diplôme, comme la plupart de mes camarades de promotion, j’ai très vite été recrutée. 

C’est au sein de l’établissement Jousselin que j’ai occupé le poste de chargée d’affaires et ce, durant deux ans. 

Entre mon rôle de maman de deux enfants, le souhait de me rapprocher de mon conjoint et l’envie de m’épanouir professionnellement, il m’a fallu rechercher un nouvel emploi. Poste que j’ai trouvé en un temps record en intégrant l’entreprise Maurice Bonnet en tant que métreur.

Monsieur Bonnet, directeur fondateur de l’entreprise m’a proposé de faire évoluer ma carrière. C’est ainsi que j’ai accepté de reprendre l’entreprise familiale avec deux de mes collègues aujourd’hui devenus mes associés, après douze années d’étroite collaboration. 

Lorsqu’on est une jeune femme, y a-t-il des obstacles pour accéder non seulement à la formation mais surtout pour convaincre un maître d’apprentissage ?

Il y a 20 ans, j’ai en effet rencontré quelques obstacles. Tout d’abord, au lycée Livet où nous n’étions que 6 filles sur 90 garçons dans la section Génie civil. La féminisation des métiers du bâtiment était méconnue tant dans les écoles qu’en entreprise.  Dans le cadre de ma recherche d’un maître d’apprentissage, j’ai effectivement essuyé plusieurs refus. Fort heureusement, tous n’étaient pas liés au fait que j’étais une femme. 

Je dois bien reconnaître qu’il m’a fallu subir quelques remarques sexistes de la part de certains hommes peu ouverts à l’idée d’une féminisation des métiers du bâtiment. Pour eux, très clairement, une femme n’avait pas sa place sur le chantier ! 

Autres temps, autres mœurs !

Par ailleurs, si la raison n’est pas évoquée ouvertement, alors que c’est complètement discriminatoire, la maternité ou future maternité est un frein à l’embauche. J’en parle en connaissance de cause.  Lors d’un entretien, à profil équivalent, c’est un homme qui avait été retenu. Cette fois-là, le recruteur me l’avait avoué. Heureusement, les mentalités ont évolué et je n’ai plus jamais eu de propos désagréables sur le fait que je sois une femme. 

Aujourd’hui, pensez-vous qu’il y a des perspectives d’embauches dans le bâtiment pour la gent féminine ? Quels secteurs en particulier ? Carreleuse, peintre, ébéniste ?

Il y a de nombreuses propositions d’emploi sur les métiers d’encadrement, de dessinatrice, voire même de conductrice de travaux… Les entreprises de peinture embauchent beaucoup de femmes peintres et obtiennent régulièrement la parité. En revanche, dans les autres corps de métiers, nous rencontrons assez peu de femmes. À regret, car certains métiers sont réellement accessibles aux femmes et recrutent énormément comme les plaquistes, les plombiers, les électriciens… 

Avez-vous observé au fil des années des reconversions liées à la dureté du travail de carreleuse ?

Nous avons embauché plusieurs femmes carreleuses, souvent en reconversion professionnelle grâce à des formations adultes sur une année. Parfois elles ont fait carrière. Malheureusement, certaines n’ont pas souhaité poursuivre pour des raisons de santé. En effet, le métier de carreleuse est un métier difficile qui sollicite les genoux, le dos et les mains. La position agenouillée ou accroupie prolongée entraîne aussi des lésions chroniques méniscales.

Malgré des postures de travail contraignantes, certaines femmes restent persévérantes dans leurs activités, conscientes qu’il est nécessaire d’avoir une bonne condition physique pour être carreleuse. C’est un métier tellement passionnant de créativité, de décoration, d’accompagnement des clients dans leur projet, que j’encourage les femmes dans cette voie.

Cariforef des Pays de la Loire, mars 2022

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