Raconte-moi ta formation d’infirmière



Interview de Nathalie Thomas âgée de 39 ans, mariée et mère de 4 enfants qui a suivi la formation d’infirmière pour obtenir le diplôme d’État - (Session de formation 2018-2021 Ifsi Cholet financée par la Région des Pays de la Loire). Elle évoque son parcours personnel et professionnel, les démarches à suivre pour bénéficier de cette formation de 3 ans et l'organisation qu'elle s'est imposée. Retour sur le long et beau parcours d'une femme déterminée !

   

Nathalie, vous êtes sur le point d’obtenir votre diplôme d’infirmière, pouvez-vous nous raconter votre parcours scolaire, personnel et professionnel ?  

Je suis titulaire d’un Bac technologique SMS (ST2S) obtenu en 2001 après une formation à Talensac.  À l’époque, je voulais être éducatrice pour jeunes enfants, j’ai donc fait une année de préparation. Après avoir échoué au concours éducateur pour jeunes enfants, j’ai travaillé avec en poche juste mon bac SMS pour exercer le métier de secrétaire médicale au sein d’un cabinet d’ophtalmologie et ce, durant une dizaine d’années. 

Après tout ce temps, le besoin de contact avec les patients me manquait. Ce métier de secrétaire ne me convenait plus. J’en avais sans doute fait le tour ! J’ai donc entamé un bilan de compétences. Ce travail introspectif m’a fait réfléchir sur mon parcours et a mis en évidence ce que je savais déjà : Je voulais être en relation avec des patients, ceux-là mêmes que j’accueillais derrière un bureau pour des rendez-vous médicaux. 

Étant donné qu’au tout départ, je ne voulais pas être infirmière, j’ai passé le concours d’aide-soignante en 2011-2012 que j’ai obtenu. Et c’est ainsi qu’en même temps que j’attendais notre troisième enfant, j’intégrais l’école d’aide-soignante pour une formation d’une année. 

Après la formation d’aide-soignante où je pouvais enfin œuvrer et prendre soin des autres, j’ai travaillé en tant qu’aide-soignante durant 2 ans puis j’ai eu mon 4e enfant. C’est à ce moment-là qu’avec mon mari nous avons entrepris un long voyage de 7 mois des États-Unis à la Nouvelle Zélande en passant par la Thaïlande et Singapour avec les 4 enfants âgés de 17, 14, 10 et 6 ans. Du bilan de compétences au grand voyage, le pas fût grand et constructif.   

Durant ces 7 mois de voyage, j’ai eu le temps de réfléchir et de faire une introspection un peu comme un bilan pour m’interroger sur ce que j’avais réellement envie de faire de ma vie professionnelle. Force est de constater combien partir à la découverte du monde m’a permis d’observer à la fois la gentillesse, la bienveillance et l’accueil des gens des autres pays mais aussi les multiples cultures qui font la richesse des rapports entre les êtres humains.

Je peux dire que c’est à partir de toutes ces richesses humaines rencontrées lors de ce périple qui bousculait mes habitudes de vie que j’ai senti en moi une force. Soudain, tout me semblait réalisable ! J’avais une immense envie d’apprendre et d’aller de l’avant !  

A mon retour en France, j’ai suivi une formation d’hypnose durant 6 mois (2 jours par mois durant mon congé parental). Tout ce qui touchait à la prise en charge de la douleur me tenait vraiment à cœur, alors je me suis payé cette formation.  

     

En dehors de ce voyage et de ses répercussions, qu’est ce qui, selon vous, fait qu’on est attiré par ce besoin de soigner les autres ? 

J’ai baigné dans un milieu médical. Mon père était directeur régional d’un laboratoire pharmaceutique et ma mère était infirmière malgré des soucis de santé. Toute jeune, je l’épaulais beaucoup. Au regard de ce que fut mon environnement familial, soit je m’apitoyais sur notre sort, soit j’en faisais une dynamique en me positionnant dans l’accompagnement de ma mère. Il s’agissait sans doute pour moi d’une construction identitaire. Je pense que les parcours et les histoires familiales peuvent considérablement influencer nos décisions. Et si je suis une soignante aujourd’hui, il me semble que ça coulait de source me concernant. À travers les épreuves de la vie notamment l’accompagnement dans le décès et la maladie d’un proche, je réalise que depuis toute petite, j’étais dans cette envie de "prendre soin de l’autre".  

  

Quelles démarches avez-vous suivies pour bénéficier de cette formation ? 

En janvier 2018, c’est-à-dire à la fin de mon congé parental, j’avais le statut de demandeuse d’emploi. J’ai profité de cette période pour préparer les concours d’infirmière. Durant l’été 2018, tandis que je travaillais au CHU comme aide-soignante, je savais que pour suivre la formation d’infirmière et pour qu’elle soit financée par la Région, je devais être sans emploi ou bien alors être en poursuite d’études après le bac. J’ai donc refusé la proposition d’un contrat pour quelques mois que le CHU me proposait. Ensuite, c’est en faisant des recherches par moi-même que j’ai su que la formation était non seulement financée par la Région mais que par ailleurs, je pouvais être indemnisée par Pôle emploi. Il faut savoir que cette formation coûte 8 000 euros à l’année, ce qui n’est pas rien, d’autant plus pour une formation d’une durée de 3 ans ! 

  

Avez-vous été rémunérée et par qui ? 

Oui, comme je vous le disais, j’ai été rémunérée par Pôle emploi durant un an sur la base de mes anciens salaires car j’avais travaillé puis ça a basculé en allocation de fin de formation qui varie entre 300 et 650 euros par mois. Personnellement, je percevais 650 euros pendant les deux dernières années de ma formation sauf sur la période des vacances d’été en juillet et août car là, les élèves ne sont plus en formation. Dans ce cas-là, soit nous travaillons, soit nous sommes en vacances mais sans revenus. Le fait que cette formation soit prise en charge financièrement par la Région est un atout considérable. Sans cela, ce serait impossible à réaliser. Ne pas avoir de revenus pendant 3 ans et payer 24 000 euros, autant dire que c’est impossible même sans avoir 4 enfants à charge ou alors il faut avoir un mari médecin ! (rires

  

Qu’est-ce qui vous a plu dans cette formation ? 

J’ai appris beaucoup de choses. Tout était incroyablement enrichissant et professionnalisant. Honnêtement, tout m'a plu. Je dois dire que l’Ifsi de Cholet est un établissement à taille humaine proche de ses élèves avec de surcroît un encadrement de qualité.  Malgré les difficultés, je ne me suis jamais sentie "abandonnée" ou "perdue"

La formule stage de 10 semaines est coupée en deux soit 5 semaines de stage et 5 semaines en cours. Ensuite, on retourne sur le lieu à nouveau 5 semaines. Cette coupure est une très bonne chose, elle permet d’intégrer des connaissances, de faire un parallèle ou de mettre en évidence les écarts entre la pratique et la théorie, de l’évoquer en cours pour ensuite revenir sur le lieu de stage.  

  

Comment s’est déroulée votre formation durant la pandémie ? 

L’accompagnement s’est bien passé même si je dois reconnaître que suivre des cours en visioconférence ou sur des Powerpoints n’a rien d’évident. Lors du premier confinement, nous n’avions plus d’échanges directs avec les intervenants, ce qui évidemment, ne facilitait pas l’intégration des connaissances. La charge de travail était très importante car tout devait être géré par mails. Nous étions inondées de messages et devions nous débrouiller entre nous pour suivre les travaux de groupes. L’organisation ne s’est pas faite sans mal. Au deuxième confinement, les choses se sont améliorées. Les stages en milieu hospitalier, malgré cette étrange période, se sont bien déroulés me concernant mais je ne suis pas certaine que ce soit la même chose pour mes collègues. 

   

Quand on est mère de 4 enfants et qu’on reprend ses études pour 3 années, soit on est une superwoman, soit on est une femme super organisée ! Quel est votre secret ? 

Je ne suis pas une “superwoman” et je ne suis pas non plus super organisée, mais j’ai la chance d'avoir un mari qui a fait lui aussi beaucoup de concessions. Il est artisan chef d’entreprise, donc très occupé. Et puis, il faut accepter que tout ne soit pas parfait dans le quotidien. En d’autres termes, il faut tolérer que la maison ne soit pas "nickel", que le bac de linge sale déborde, que le panier de linge propre s’entasse non pas pour être repassé, ça, on oublie, mais juste pour être plié et rangé !   

  

À quels moments de la journée preniez-vous le temps de réviser vos cours, d’avancer sur les travaux demandés et de rédiger vos rapports de stage ou votre mémoire de fin d’études ? 

Avec une vie de famille, il est impossible de réviser et de bosser les cours en rentrant à 17 ou 18 heures. C’est plutôt à partir de 21 heures ou 22 heures lorsque tout le monde était couché que je pouvais enfin m’atteler à la tâche jusque tard dans la nuit ! Durant la première année, étant donné qu’il y avait énormément de connaissances théoriques à absorber, je dormais 5 heures par nuit. La deuxième et troisième année, je travaillais toujours autant le soir et consacrais pas mal de week-ends et de dimanches pour réviser ou pour avancer sur les travaux qui étaient à rendre. 

   

Que diriez-vous aux personnes tentées par cette reconversion ? Vos conseils, vos réflexions, les bonnes attitudes ? 

Je dirais que rien n’est impossible mais qu’il faut s’en donner les moyens. Certes, ça n’a pas été facile et ces trois ans ne sont passés aussi vite qu’on voudrait bien le dire. C’est long trois ans !  Mais la fierté et la satisfaction d’y être parvenue me réjouissent aujourd’hui. 

Si je devais donner des conseils à une future étudiante infirmière pour tenir le coup, je dirais qu’il est important d’être entourée de personnes-ressources durant toute cette période. Je parle de personnes-ressources au sein de la formation mais aussi dans l’entourage proche car, c’est un énorme investissement personnel ! Il faut aussi se dire que même si ça donne l’impression d’être insurmontable, "ça n’est pas non plus le Mont Blanc à escalader". Il est important d’avancer palier par palier en évitant de regarder tout en haut car ça peut donner le vertige (sourire). Il faut être assidue au travail tout en avançant pas à pas et prendre les choses comme elles viennent sans imaginer le final. En tous les cas, c’est ainsi que j’ai fonctionné. Un autre conseil que je donnerais et pas le moindre, c’est celui d’écouter les enseignants et les intervenants et de participer en cours, car c’est au moins 50 % d’acquisition des connaissances. Il est essentiel de ne jamais rater aucun cours. Tout est bon à prendre car tout est important ne serait-ce que pour sa culture personnelle.

  

Avez-vous déjà des perspectives d’embauches en cette fin du mois de juin ? 

Pour tout vous dire, je n’ai que l’embarras du choix ! J’ai déjà un contrat par le biais d’une entreprise d'intérim pour cet été. Les premières questions qui m’ont été posées s’orientent essentiellement sur ce que je souhaite. Si je préfère travailler de jour ou de nuit, dans tels ou tels services ? Je n’ai aucune inquiétude sur le sujet, il y a du travail pour nous ! 

   

Pour aller plus loin 

Découvrir l’offre de formation sur le site prochoisirmonmétier
Découvrir le dispositif "Région formation - Visa sanitaire et social"

   

Cariforef des Pays de la Loire, juin 2021

Bibliographie

Étude régionale 
Six mois après leur sortie de formation, neuf sortants de formations sanitaires et sociales déclarent occuper un emploi 
Cariforef des Pays de la Loire, 2021 

  

Politiques publiques 
De nouveaux financements sont octroyés pour la formation des métiers du secteur sanitaire et médico-social
Le Quotidien de la formation, 2 avril 2021 

Le gouvernement et Régions de France s'unissent pour augmenter le nombre de places en formations sanitaires et sociales
Julie Lanique - AEF info, 4 mars 2021 

  

Marché du travail 
Le Pôle santé sud du Mans innove pour recruter ses infirmiers 
Colin Ancel - Le Maine libre, 24 avril 2021 

Vitalis Médical Vendée recrute une cinquantaine de postes paramédicaux
Le journal des entreprises, 21 avril 2021 

La clinique de Châteaubriant recherche des aides-soignants et infirmiers notamment pour son bloc opératoire
Marie Mangane - L'éclaireur, 18 décembre 2020 

Les services à la personne recrutent dans la Sarthe
Ouest-France, 20 août 2020 

    

Guide et fiches métiers 
Découvrir les métiers des soins infirmiers sur le site Choisirmonmetier-paysdelaloire.org 

Les métiers du paramédical en Pays de la Loire
Région Pays de la Loire, Onisep Pays de la Loire, 2020 

    

Vidéos métiers 
Infirmier anesthésiste 
Hôpitaux universitaires de Strasbourg, 2021 

Le métier d'infirmière raconté par des professionnels et des étudiants 
Caroline Philibert, Comité d'entente des formations infirmières et cadres, 2019 

J'irai soigner chez vous : portrait d'infirmière libérale 
Alizée Cuvelier, 2019 

Le sexe de mon job : Jérémy, infirmier pédiatrique 
Éléonore Dumas, ÉgalitéEs, 2016